Elections de juin 2023 au Guatemala
Question publiée au JO le : 28/03/2023
Mme Ersilia Soudais appelle l’attention de Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur la fragilisation de l’État de droit au Guatemala et la dérive autoritaire du régime guatémaltèque.
En 2012, la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) a reconnu l’État Guatémaltèque comme responsable de graves violations des droits humains dans l’affaire Diario Militar. Plus de vingt-cinq ans après les accords de paix, la situation des défenseurs des droits humains reste préoccupante. Les organisations de la société civile, les opérateurs de justice ainsi que la presse sont victimes de pressions et d’attaques, de criminalisation et de détention arbitraire.
En octobre 2022, dans leur rapport de mission, la Fédération Latinoaméricaine des Magistrats (FLAM) et l’Union Internationale des Magistrats (UIM) concluent que les normes minimales pour garantir l’exercice de la fonction juridictionnelle de manière indépendante ne sont pas réunies dans le pays, alimentant l’impunité et l’instabilité au Guatemala.
Les prochaines élections présidentielles de juin 2023 se déroulent dans un climat de tension politique et sociale, notamment poussé par l’attente du procès des détenus-disparus, victimes du conflit armé. Dans ce cadre, Thelma Cabrera Pérez, candidate de gauche et seule représentante des peuples indigènes, se voit empêchée de concourir sous prétexte que son colistier ferait l’objet d’une enquête. Une décision jugée fallacieuse par de nombreuses ONG. « C’est la pire régression depuis le retour de la démocratie, selon Ana Maria Mendez, directrice du Bureau de Washington pour l’Amérique latine (WOLA). Les élections perdent toute validité avec l’obstruction de cette candidature, très populaire ».
Mme la députée demande quels moyens le Gouvernement français entend mettre en œuvre, avec l’aide de ses voisins européens, pour s’assurer du déroulement démocratique du processus électoral au Guatemala en juin 2023.
Texte de la réponse
Réponse publiée au JO le : 20/06/2023
La France suit avec une grande attention l’évolution de la situation de l’État de droit et des droits de l’Homme au Guatemala.
Nous observons avec préoccupation les poursuites à l’encontre de magistrats et de juges liés à la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) et au parquet national anti-corruption (FECI). Nous déplorons également les atteintes croissantes à la liberté de la presse. L’Union européenne (UE) s’est exprimée à quatre reprises depuis le 11 février 2022, date à laquelle elle avait manifesté son inquiétude face à la dégradation de l’État de droit, et appelé les autorités guatémaltèques à assurer la sécurité des détenus et à respecter les droits de la défense.
Le 17 mai 2022, le porte-parole du Service d’action extérieure de l’UE a manifesté nos « préoccupations quant à la volonté des autorités du Guatemala de s’attaquer à la corruption et de sauvegarder l’indépendance de la justice », suite à la réélection de la procureure générale Consuelo Porras. Le 1er août 2022, il a marqué nos inquiétudes face au placement en détention de José Rubén Zamora, directeur d’El Periodico, l’un des principaux quotidiens indépendants du pays. Le 18 janvier 2023, l’UE a fait part de sa préoccupation face aux « persécutions et intimidations » de la justice guatémaltèque à l’encontre des acteurs de la lutte anti-corruption, à la suite de l’ouverture d’une enquête contre l’ancien président de la CICIG, Ivan Velasquez.
En janvier 2023, dans le cadre de la 42e session de l’Examen périodique universel du Comité des droits de l’Homme, la France a recommandé au Guatemala de préserver l’indépendance de la justice, de ratifier l’abolition pleine de la peine de mort, de garantir la liberté de la presse, et de lutter contre les discriminations et violences faites aux femmes. Notre appui à la société civile est un axe essentiel de notre coopération au Guatemala. En 2022, la France a mis en œuvre des programmes de soutien à la presse et à l’égalité femmes-hommes, en particulier sur les volets des droits et santé sexuels et reproductifs et de l’autonomisation politique et économique des femmes. Ces programmes seront poursuivis en 2023. Nous rencontrons régulièrement des représentants de la société civile et des journalistes, tant à Paris qu’à Guatemala, pour évoquer les thèmes liés aux droits de l’Homme, au fonctionnement de la justice et à la préservation de l’environnement.
Dans ce contexte, et face au climat de tension qui imprègne la campagne des élections générales de juin 2023, nous sommes convenus avec nos partenaires de l’opportunité de déployer une mission d’observation électorale de l’UE. L’Organisation des États américains (OEA) prévoit également l’envoi d’une mission d’observation, que la France appuie à travers sa contribution volontaire annuelle au Département de coopération et d’observation électorales de l’OEA.